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La Corse au XIVe siècle, du temps de Sambucucciu

Dernière mise à jour de cette page le 17/07/2013

Cantons concernés : Bustanicu

La Corse au XIVe siècle, du temps de Sambucucciu

Sambucuccio d’Alando est un personnage historique incontournable du Moyen Age corse. Et pourtant, nous ne savons presque rien de celui que l’on présente comme une vraie légende, un précurseur à Sampiero Corso. Certes, son nom revient dans les écrits de Giovanni della Grossa et ont retrouve sa trace dans des documents administratifs génois jusque dans les années 1370. Néanmoins, les contours de ce personnage restent flous.

Il est surtout connu pour avoir incarné la révolte populaire corse de 1357-1358, dont il aurait été l’un des chefs. En effet, ces années là, les Corses se soulèvent contre les seigneurs locaux afin de mettre en place un gouvernement populaire. Il s’agit donc de renverser les nobles, qui transmettent le pouvoir de père en fils, et de les remplacer par des notables désignés par la population, ce que l’on appelle « a popolo e commune ».

Dans ce contexte de soulèvement et de révolte, Sambucuccio apparaît comme un véritable héros populaire, un précurseur. La Corse se trouve, à cette époque, dans un contexte politique assez floue. La disparition de Giudice a certes laissé un vide, mais également un héritage lourd de sens pour les seigneurs corses qui se partagent de nouveau l’île. Par son œuvre, Giudice a prouvé qu’il était possible d’installer une seigneurie unique sur l’ensemble de la Corse, à la condition d’être appuyé par une puissance extérieure. Au XIVème siècle, de nombreux seigneurs insulaires se montrent ainsi désireux d’exercer cette pleine puissance. Parmi eux, Rinieri de Gozzi, Arrigo Strambo ou encore Goglielmo della Rocca, le petit-fils de Giudice. Pour parvenir à ses fins, ce dernier se tourne vers Gênes, qui envoie sur l’île un certain Gottifredo de Zoagli. Ce dernier est mandaté par Gênes afin d’écraser les seigneurs corses qui refusent de se soumettre à son autorité. Après avoir débarqué à Calvi en 1340, ce dernier mène plusieurs actions particulièrement violentes contre tous ceux qui se dressent contre lui. Lorsque sa mission est accomplie, et qu’il rentre à Gênes, il confie à Goglielmo le titre de « Lieutenant du Vicaire », faisant de lui le seigneur le plus puissant de Corse.

Goglielmo termine le travail commencé. Il se rend maître du sud de la Corse, et à l’instar de son illustre grand-père, regarde vers le nord. L’ambitieux se détourne alors de Gênes et se rapproche du roi d’Aragon. Lorsque la guerre éclate en 1351 entre les Génois et les Catalans, et que la flotte aragonaise envoie par le fond la flotte génoise en Sardaigne, Goglielmo prend une décision lourde de conséquences : il fait allégeance au roi d’Aragon. Cette volte-face provoque une révolte des seigneurs corses fidèles à Gênes. Goglielmo est alors désigné comme un traître. Cette révolte est fatale à Goglielmo, en 1354. Ce dernier est en effet tué d’un coup d’arbalète en pleine tête au moment même où ses soldats assiègent le château d’Istria. Le projet d’installer une seigneurie unique sur la Corse est une nouvelle fois un échec.

Ces faits coïncident avec l’émergence en Corse d’une communauté de pieux laïcs menée par un certain Rostaurius, et appelée « Giovannali ». Ces derniers entrent en conflit avec l’évêque d’Aléria qui les accuse d’hérésie. Les Giovannali sont accusés de mille maux, et notamment, la mise en commun des biens. Ceux qui sont considérés comme des hérétiques sont donc massacrés jusqu’aux derniers, dans une véritable croisade ordonnée par le pape lui-même.

Puis, éclate sur l’île, la révolte contre les seigneurs. Les faits, là encore, nous sont rapportés par Giovanni della Grossa. Le soulèvement est tel que de nombreux châteaux sont brûlés. Les révoltés décident toutefois d’épargner quelques places fortes qu’ils occupent désormais, afin de préparer une nouvelle organisation de l’île, résolument tournée vers l’Italie. Sambucuccio d’Alando fait parti de ces notables, qui portent et encadrent la révolte. Giovanni della Grossa présente d’ailleurs Sambucuccio comme faisant parti des « capi popoli ». Nous apprenons également que ce dernier est originaire du centre de la Corse, et plus particulièrement du Bozio. Il est un « homme du peuple », « plein de bravoure » et « jouissant d’une grande réputation ». Il est notable, habile au combat, bien né plutôt que paysan. Il est également instruit, habile à la négociation et intelligent. Sambucuccio remporte d’autre part une bataille en 1357, face aux seigneurs, à Mutari d’Alesani. C’est à la suite de ce succès, qu’il est désigné, avec d’autres compagnons, « chef de la révolte ».

Les chefs de l’insurrection se rendent ensuite à Gênes, en 1357, afin de demander de l’aide. En 1359, Sambucuccio siège lui-même, en compagnie d’autres compagnons, auprès du gouverneur génois en Corse. Ces chefs de la révolte forment alors le « Consilium Corsice ». En 1358, à Calvi, le Génois Leonardo Montaldo reçoit la dédition de la Corse à la Commune de Gênes, « au nom de tout le peuple corse ». Sollicitée, Gênes promet d’envoyer sur l’île un gouverneur afin d’administrer la Corse et d’exercer la justice, légitimisant de ce fait son implantation sur l’île. Nous pouvons donc en conclure, que malgré les droits du pape et de l’Aragon sur l’île, ce sont les Corses, eux-mêmes, qui se désignent un maître : Gênes.  La tyrannie d’une puissance étrangère semble donc préférable à la tyrannie des seigneurs locaux. Nous trouvons dès lors deux systèmes politiques bien établis et forts différents : la terra del commune, et la terra di i signori.

La révolte portée par Sambucuccio et par ses compagnons marque ainsi un tournant décisif dans l’histoire de la Corse, qui devient génoise. En 1365, Tridano della Torre est envoyé sur l’île en tant que gouverneur. L’implantation de ce dernier ne se fait pas sans remous. Les seigneurs déchus du nord de l’île tentent de l’assassiner afin de rétablir leur seigneurie. L’instabilité politique s’en trouve donc renforcée, et amplifiée par des désastres multiples, comme des famines et la peste noire qui ravage d’Occident chrétien, et dont la Corse n’est pas épargnée. Toutefois, dans ce marasme, Sambucuccio continue de se battre pour tenter de créer un ordre, une justice et de maintenir une stabilité politique sur l’île. Aujourd’hui, son nom légendaire est associé à la notion de peuple corse.

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