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Corse le Syndrome de Penelope

Dernière mise à jour de cette page le 05/01/2013

De Sanguinetti Sampiero.

Description de l'ouvrage

Pourquoi sous-développement, démographie atone, apathie économique et révolte sociale sont-ils devenus l'apanage de la Corse d'aujourd'hui ? Que s'est-il passé aux XIXe et XXe siècles dans les rapports entre le pouvoir central français et la Corse, fraîchement «intégrée», pour que cette dernière apparaisse désormais aux yeux de beaucoup comme la région emblématique de l'assistanat, du gaspillage et de l'archaïsme ?

L'auteur propose de revenir sur ce que furent les lois douanières au XIXe siècle et fait l'analyse des raisons pour lesquelles elles furent imposées à la Corse pendant quatre-vingt-quatorze ans. Ces lois montrent que la France a considéré la Corse, dans ses relations avec la métropole, comme un pays étranger jusqu'en 1912. Elles se sont soldées par l'affaiblissement des savoir-faire traditionnels, l'exode de la population et une crise économique majeure. Au XXe siècle, le constat est celui du maintien d'un système qui a constamment favorisé la consommation au détriment de la production et donc du développement économique.

La Corse qui était, au sortir de la Seconde Guerre mondiale, dans une situation de faiblesse alarmante, s'est brutalement trouvée confrontée à deux grands défis : celui des atteintes à l'environnement et celui du tourisme de masse. Elle n'était pas armée pour répondre à ces questions et, paradoxalement, loin de l'aider à les affronter, l'administration française a multiplié les erreurs et les maladresses à son encontre.

C'est sur ce terrain d'un bilan problématique, vécu sur l'île comme une injustice, que s'est développée une forme spécifique de violence. Une violence que l'auteur compare, pour un temps, à celle d'une Pénélope détruisant la nuit ce qu'elle produit le jour... en attendant le retour d'un mythique Ulysse.
Le tableau est inquiétant mais il n'est pas désespéré. Le sursaut de la fin du XXe siècle n'a pas permis d'éviter tous les pièges, mais il a conduit a des avancées. Et il se pourrait même qu'«Ulysse existe».

Sanguinetti Sampiero, journaliste et homme de télévi­sion depuis plus de trois décennies, est l'un des pionniers de la télévision régionale en Corse et l'un des principaux promoteurs de « Via Stella », la télévision insulaire diffusée par satellite. Il fut aussi le rédacteur en chef pour la France de l'émission Mediterraneo, une coproduction méditerranéenne unique en son genre. Il est l'auteur de deux essais sur l'exercice du métier de journaliste à partir de ses propres expériences professionnelles. Extrait de l'introduction

Je travaillais alors en Sicile, au sein d'une rédaction chargée de concevoir un « programme-magazine» pour la télévision en Méditerranée. Mes confrères, camarades siciliens et maltais, me pressaient couramment de leur parler de la Corse. Ce qui aiguillonnait de manière régulière cette demande insistante, c'était l'information sur les événements qui agitaient notre île, à savoir la violence. Je n'avais pas envie d'accrocher un discours sur des images trompeuses et je ne savais pas comment leur expliquer en peu de mots, peu d'images, comme nous faisons toujours à la télévision, les divers engrenages qui avaient conduit là. Nous eûmes de longs débats au cours desquels, bien sûr, je me heurtais de front à leur grande ignorance concernant nos problèmes. Un beau jour l'un d'entre eux, dans la conversation, me posa la question du nombre d'habitants qu'il y avait en Corse. « Deux cent cinquante mille » répondis-je très vite à l'ami sicilien. «Non, tu as mal compris, enchaîna-t-il alors, je parle de toute la Corse ! » « Deux cent cinquante mille », confirmai-je bien sûr... Il y eut dans la pièce, tout autour de la table, une sorte de silence. « Mais c'est insignifiant ! » lâcha mon vis-à-vis. J'étais un peu blessé par cet « insignifiant. » À la vérité, pourtant, je manquais d'arguments. La ville de Païenne est peuplée à elle seule d'un million d'habitants (un peu moins d'un million) à l'égal de Marseille, le pays de Sicile en compte six millions ! Deux cent cinquante mille pour la Corse toute entière ! « C'est justement ce chiffre, difficile à comprendre, dont la cause, l'origine, pourrait bien expliquer le malaise de la Corse » hasardai-je prudemment.

Un énorme fossé séparait donc la Corse de ses deux îles soeurs, la Sardaigne, la Sicile. D'un côté comme de l'autre chacun était conduit à penser sans le dire que nous ne parlions pas vraiment de la même chose. «Je ne considère pas la Sicile comme une île», m'avait d'ailleurs confié une amie, professeur à l'université de Corse. Manière un peu facile de nier le problème. Restait à expliquer deux millions d'habitants dans la Sardaigne toute proche, sept cent mille habitants dans les îles Baléares, trois cent cinquante mille dans les îles maltaises grandes, à quelque chose près, comme notre seul Cap Corse. On me rétorquera que dans le monde moderne le spectre omniprésent d'une surpopulation constitue une menace. La modestie du nombre pourrait être perçue comme un gage d'espace et donc de qualité. Cela serait exact à la seule condition que ce beau résultat ne soit la conséquence d'une série d'échecs et ne se traduise pas par des déséquilibres, l'absence de production et les signes insistants d'un mal vivre profond. L'état démographique de cette île de Corse paraissait bien plutôt être le résultat d'une histoire malheureuse, la manifestation d'une gestion chaotique. Faire de ce handicap un atout pour l'avenir n'était envisageable que si nous corrigions tous les déséquilibres, si nous calmions les craintes, fabriquions de l'espoir, gommions le sentiment de la fatalité, de l'échec nécessaire, du mal incontournable, que nous découvrions les raisons mécaniques d'une crise interminable.

  • Broché
  • Editeur : Albiana (2 juillet 2008)
  • Collection : ARTICLES SANS C
  • Langue : Français
  • ISBN-10:2846982368
  • ISBN-13:978-2846982368
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